En guise de préambule, avec une anecdote sur la génération de leads

Web marketeurs : Votre génération de leads n’est pas optimisée !
Or c’est rarement le cas, la remarque principale que l’on obtient étant : « Vos leads ne sont pas bons », en soi un écho au film culte Glengarry Glen Ross excuse qui cache tout un tas de réalités bien plus complexes. Quand l’accueil réservé aux dits leads n’est pas tout bonnement l’indifférence. J’ai ainsi mis en place il y a quelque temps, un système particulièrement sophistiqué de génération de Leads, pour lequel nous identifions les noms des entreprises connectées, les établissements et achetions des adresses mail que nous invitions en double-opt in. Cette logique de « nurturing » était très puissante, et basée sur une ossature de contenus de premier plan, qui bien entendu générait des leads.5 jours pour rappeler un lead ? Impensable !
Quelle n’était pas notre surprise de constater que les commerciaux, malgré nos précautions, et la mise en place d’un processus formel d’alertage, laissaient passer jusque 4 à 5 jours pour rappeler un lead. Il va de soi qu’aucun de ces leads n’aboutissait, car qui se souvient d’un site visité il y a 5 jours ? Ce comportement n’est pas isolé. Mais qu’en est-il 5 ans après ? Les entreprises ont-elles gagné en maturité ?
Génération de leads : marketeurs de tous les pays réjouissez-vous ! Enfin presque …

Alors, regardons d’abord le côté du verre à moitié plein. Pour cela, je vais me pencher sur 2 études récentes, l’une réalisée par Televerde (2017) et l’autre par Insideview (2018), sur le sujet de l’alignement vente/marketing.
Du positif et beaucoup de progrès, grâce notamment à la technologie
Cette situation d’il y a cinq ans, où les commerciaux mettaient un nombre de jours incroyables pour rappeler les leads, est probablement en train de disparaître de l’autre côté de l’Atlantique. Je mettrais plus de réserves de ce côté-ci de la mer.
L’étude Televerde de 2017 montre que des progrès importants ont été réalisés en termes d’alignement entre le marketing et la vente :
« L’état de l’alignement entre ventes et marketing est loin d’être aussi désespérant qu’il était il y a cinq ans. Une majorité de professionnels des ventes pense que ventes et marketing sont alignés dans leurs entreprises et 77 % qualifient même les leads qu’ils reçoivent du marketing de « bons, à « excellents ».
Voilà qui est rassurant, même si le sondage auquel je fais référence dans cet article, et que vous pouvez télécharger, laisse apparaître que de grands progrès en termes d’alignement restent à faire, notamment sur la capacité à regarder l’entonnoir des ventes de manière plus systématique (à ce sujet je vous envoie sur un billet qui explique que l’entonnoir des ventes date du …. 19e siècle). Malgré cela et le témoignage positif de certains professionnels qui insistent sur l’amélioration de la qualification et de l’apport de leads, attribués en grande partie à la maturation de la technologie, le processus de qualification de leads reste problématique pour une proportion de 30 % des interviewés (c’est-à-dire, 30% des 200 responsables des ventes en B2B interviewés en 2017 par Televerde).Des nuances et des explications : étude Insideview de 2018
L’étude Insideview de 2018 est quant à elle beaucoup plus nuancée. Elle constate également des améliorations nettes, mais elle met aussi l’accent sur le fait que de grandes marges de progression existent quant à cet alignement, dont tout le monde s’accorde à dire que s’il était meilleur, les résultats commerciaux le seraient également. Dans cette étude c’est 500 professionnels des ventes du marketing qui ont donné leur vue croisée sur les deux professions. Nous allons regarder ici des sujets qui concernent plus particulièrement la génération de leads, qui est notre sujet du jour.Alignement vente / marketing : un coup de frein lié aux données
Tout d’abord l’étude observe un frein lié aux données :« La valeur de la donnée est évidente et pourtant la présence de données dans la discussion de l’alignement reste un problème », constatent les analystes. Notamment du fait que ces données sont emprisonnées dans des silos étanches. Les deux camps (ventes et marketing) voient une valeur évidente dans le partage des données, depuis le planning jusqu’à la prévision, mais force est de constater cependant que les données ne circulent pas librement de l’un à l’autre ».
Pour ma part, cela paraît quelque peu surréaliste par rapport à mes travaux pionniers sur le CRM des années 90. J’ai l’impression que finalement on a rajouté beaucoup de technologie, mais qu’un peu de qualité dans les processus et le travail permettrait d’aller beaucoup plus vite.Les leads au cœur des mécontentements
Force est de constater (page 8 de l’étude) que la première chose que demandent les commerciaux est des leads de meilleure qualité (23 %), mais aussi en plus grande quantité (15 %). Pour peu on s’attendrait à entendre Alex Baldwin dans sa fameuse tirade. Revers de la médaille, les marketeurs se plaignent quant à eux (22 %) d’un manque de suivi de ces leads. Mais aussi d’un manque de retour sur les campagnes (19 %). Finalement, selon que l’on regarde le verre à moitié plein ou à moitié vide, on en revient encore au problème précédent : les ventes se plaignent des leads qui sont fournis par les marketeurs qui se plaignent des vendeurs qui chassent les leads et ainsi de suite.
Comment faire pour sortir du cercle vicieux des leads
Permettez-moi donc de vous prodiguer quelques conseils basés sur mon expérience du terrain et qui me semblent importants pour améliorer cet alignement, la qualité des leads, et enfin de l’action commerciale conjointe entre ventes et marketing et de son efficacité.1. LEAD ne veut pas dire DEAL
La première chose à faire à mon avis c’est de dépassionner le débat. Il ne faut pas confondre lead et deal. Si l’un est l’anagramme de l’autre, cela ne veut pas dire qu’ils sont équivalents. Trop de commerciaux, quand ils entendent parler de leads imaginent ainsi qu’il s’agit de « prospects » voire même encore pire, de « clients ».
Un lead n’est en aucun cas un prospect, c’est une « piste », au sens étymologique du terme. C’est un indice que l’on va pouvoir suivre et poursuivre, non pas une fin en soi.
Donc en soi, un lead n’est jamais mauvais c’est un point de départ qui peut mener à autre chose et, à force de suivi et de recherche et de rebonds, à ce que notre commercial sache exactement comment suivre cette piste. Il faut démêler l’écheveau en partant de ces leads et en allant à la cible ultime.
Ceci est souvent difficile à expliquer aux marketeurs (et aux vendeurs) trop pressés : en Inbound marketing on ne parle pas en effet de « cibles », mais « d’audiences ». Donc en quelque sorte, l’Inbound marketing va s’adresser à des gens qui parlent à des gens qui parlent à des gens qui achètent.
Parfois même longtemps après, car tous les processus de vente ne sont pas linéaires ni ultrarapides.
La première erreur commise par les marketeurs, souvent quand ils connaissent mal les technologies, est de croire que les miracles peuvent être générés directement par les solutions de marketing automation, alors qu’en fait souvent elles ne sont que des points de départ qui permette de travailler (de préférence ensemble en collaboration entre marketing et ventes) de façon à trouver les meilleures stratégies, qui restent à déterminer par des humains.
2. Tout le monde cherche la génération de leads, mais à quoi faut-il s’attendre (en fonction de qui on est) ?
Le deuxième point qui me paraît important c’est que les leads ne sont pas équivalents d’un secteur à un autre, d’un produit à un autre, etc.
Si je vends des cartouches d’encre à des PME, je peux m’attendre à ce que mon site Web génère des leads sur des paniers moyens qui sont, somme toute, très modestes, et avec des processus de décision très rapides. Ces actes d’achats ne nécessitent pas de dégager de budgets spéciaux, les niveaux de décision sont placés assez bas dans la hiérarchie de l’entreprise, et les décisions sont donc rapides.
Si je vends des services ou des projets complexes, il faut s’attendre à ce que les leads que je reçois soient de simples pistes qu’il faudra emmener au travers d’un voyage assez long, d’un certain nombre de réunions et de manœuvres d’approche et d’approfondissements qui n’ont, pour la plupart, pas grand-chose à voir avec Internet ni le marketing automation.
La destination de l’outil en fonction de l’ADN de la marque est donc primordiale, et il faut surtout éviter de faire croire aux commerciaux que les ventes vont tomber toutes seules, car cela n’est absolument pas possible (si l’on s’écarte du bas de marché B2B).
3. Mes conseils aux marketeurs qui veulent travailler avec les commerciaux.
Je ne cesse de pester contre ces marketeurs qui refusent de connaître la vente. Après tout, j’y reviendrai dans un autre article, on ne demande pas aux marketeurs de devenir vendeurs. Mais apprendre à connaître la vente et à connaître les clients n’est pas un travail qui peut se mener en chambre, et c’est une composante essentielle du marketing. Avoir pratiqué la vente est donc un sérieux atout pour un marketeur qui veut progresser.
J’ai connu une époque, quand je travaillais pour Philips comme commercial, où les marketeurs passaient beaucoup de temps à tourner dans la France entière, et dans le reste du monde, pour aller écouter directement les clients et prendre de l’information à sa source.
Certes, beaucoup des paroles qui étaient prononcées par les clients en question devaient être décodées, et dépouillées de leurs contextes et des jeux politiques, mais la présence du marketeur face au client acheteur était un élément essentiel à l’amélioration des produits et des stratégies marketing. C’était une démarche qui était également très prisée des clients, qui voyaient ces visites comme des preuves réelles de respect.
Je recommande donc aux marketeurs de s’investir physiquement avec leurs commerciaux pour éviter cette guerre stérile entre les leads qui sont passés et savoir ce qu’on ils en ont fait. Mettre en place de systèmes de marketing automation sans jamais aller voir un client, puis se plaindre après coup que les commerciaux ne rappellent les leads, est un comportement qu’il convient de bannir.
4. Mes conseils aux commerciaux qui veulent mieux profiter de la génération de leads des marketeurs
De la même manière, mes recommandations aux vendeurs seraient de cesser de râler sur la qualité ou la quantité des leads. C’est à eux également d’utiliser l’Inbound marketing comme un moyen d’aller voir plus de clients, comme je l’ai déjà expliqué dans un article précédent.
L’Inbound marketing est regardé de façon trop statique et mécaniste, comme un système qui fonctionnerait tout seul de manière plus ou moins fantasmagorique : on mettrait du contenu en ligne et miraculeusement, des leads tomberaient du ciel.
En fait, en B2B, il faut à tout prix maximiser la rencontre physique avec des responsables et des décideurs afin de maximiser les ventes et les opportunités. Dans ce cas, l’Inbound marketing est une chance pour les équipes de ventes. Elles doivent apprendre à se saisir des contenus qui sont écrits ici et là qui ne doivent pas uniquement servir à nourrir les algorithmes de nurturing de Hubspot, mais également permettre de mettre d’ouvrir des portes et surtout ouvrir les esprits des prescripteurs et des acheteurs.
Ne pas attendre de miracles de la technologie, mais l’utiliser de façon pragmatique
En conclusion de ce bref article sur un sujet aussi complexe mériterait à lui seul un livre entier, je recommanderais donc d’améliorer le dialogue avant mettre en place des processus, de partir sur le terrain et d’essayer pragmatiquement d’utiliser l’Inbound marketing sur le terrain avec les clients, travailler les leads ensemble et améliorer les processus de façon collective et pragmatique. Le marketing se doit de retrousser les manches et d’aller aider le terrain et vice versa.
En mettant un point d’arrêt à la génération de leads en chambre on fera ainsi mieux tomber les fausses excuses qui font que les uns se plaignent du manque de leads de qualité et les autres qu’ils ne sont pas suivis.
Sans cette approche pragmatique, et malgré les progrès sans doute spectaculaires de la technologie dans le futur, dans cent ans d’ici, nous ferons encore des sondages pour expliquer toujours les mêmes choses. Vendeurs et marketeurs de tous les pays unissons-nous !
